Fukushima, mon amour
Le 18 mai 2011
Un documentaire kubrickien remarquable dont l’hybridation formelle et contextuelle en fait un classique instantané de la SF. Un film d’anticipation, dans tous les sens du terme, à voir...au cinéma !
- Réalisateur : Michael Madsen
- Genre : Science-fiction, Documentaire
- Nationalité : Suédois, Italien, Danois, Finlandais
- Date de sortie : 18 mai 2011
- Plus d'informations : Le site officiel du film
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– Durée : 1h15mn
Un documentaire kubrickien remarquable dont l’hybridation formelle et contextuelle en fait un classique instantané de la SF. Un film d’anticipation, dans tous les sens du terme, à voir...au cinéma !
L’argument : Le chantier d’un sanctuaire conçu pour durer cent mille ans. Creusée dans le nord de la Finlande, à Onkalo, cette gigantesque grotte abritera des déchets nucléaires. S’adressant aux générations futures, ce documentaire en forme de film de science-fiction montre ces travaux gigantesques - cinq kilomètres de galeries plongeant 500 mètres sous terre - et pose la problématique de l’élimination des déchets radioactifs sous l’angle de la temporalité. Impliquant une responsabilité millénaire, celle-ci nous oblige à adopter une autre échelle de durée.
- © Chrysalis Films
Notre avis : Voilà un documentaire qui tombe à point nommé. Alors que le monde entier s’interroge et remet en question l’utilisation de l’énergie nucléaire au lendemain de la catastrophe de Fukushima, le film de Michael Madsen (homonyme danois de l’acteur tarantinesque) s’intéresse justement à un projet finlandais pharaonique qui consiste à creuser l’équivalent d’une cité souterraine pour y laisser reposer des déchets nucléaires pendant 100000 ans, afin d’éviter tout contact avec l’être humain. La fin des travaux et la condamnation définitive du site sont prévues pour 2100. Après, les certitudes s’amenuisent et laissent place à l’imagination. Celle des scientifiques et celle du réalisateur qui interroge les protagonistes sur l’exégèse du projet tout en leur opposant un raisonnement par l’absurde pour chacune de leur théorie. La maïeutique de Madsen fait des merveilles et offre quelques grands moments de solitude à des hommes pris au piège de leurs conjectures. Un exemple parmi d’autres : les créateurs du site souhaitent qu’il tombe dans l’oubli pour ne pas risquer que les générations futures s’y introduisent, mais malheureusement Madsen leur fait avouer du bout des lèvres que, quoi qu’il advienne, la loi les oblige à transmettre toutes les données du projet à leurs successeurs... Dommage !
- © Chrysalis Films
Mais au-delà de cette entreprise d’investigation à l’efficacité redoutable, il convient de souligner que le film procure avant tout un vrai plaisir de cinéma, éloge assez rare pour un documentaire. La réflexion citoyenne et surtout humaine du réalisateur est enrichie par un parti-pris esthétique qui puise ses atours non seulement dans un inconscient historique SF résolument kubrickien mais aussi dans tous les scénarii potentiels que cet événement réel va sans doute engendrer dans le futur. On imagine très bien un film dont l’incipit serait la construction de ce tombeau nucléaire puis la naissance d’une nouvelle forme de vie mutante et souterraine qui viendrait décimer les pauvres habitants du village voisin...entre autres possibilités. En bref, Into eternity, contrairement à bon nombre de documentaires, doit se voir en salle car c’est un superbe hommage au thriller SF tendance trip philosophique qui suit à la lettre la grammaire gravée dans le monolithe noir de 2001, l’odyssée de l’espace. Il y a des références qui ne trompent pas : les lents travellings menaçants, les circonvolutions de la caméra autour d’une foreuse au rythme d’une valse viennoise, la musique contemporaine (Arvo Pärt, Philip Glass...), l’atonalité de la voix-off de Madsen proche de celle de HAL 9000. Mais ce qui rapproche surtout Madsen du grand Kubrick, c’est cette propension, étrangère à toute misanthropie, qui consiste simplement à resituer l’Homme d’un point du vue séculaire et de le remettre gentiment à sa place, celle du gamin qui joue aux apprentis sorciers puis creuse dans le jardin du Monde pour cacher ses bêtises, en espérant vainement que ça ne lui retombe pas dessus un jour. C’est glaçant, mais éternellement fascinant.
- © Chrysalis Films
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