C’est dans les vieux pots qu’on fait la meilleure soupe
Le 22 avril 2018
Sous ses faux airs de spin-off, Creed : l’héritage de Rocky Balboa est une vraie suite à la saga du boxeur prolo de Philadelphie. Un passage de flambeau nostalgique mais pas poussiéreux, qui confirme tout le bien qu’on pensait de Stallone, et installe un jeune acteur charismatique à la tête de la franchise.
- Réalisateur : Ryan Coogler
- Acteurs : Sylvester Stallone , Tessa Thompson, Michael B. Jordan, Graham McTavish, Phylicia Rashad
- Genre : Drame, Film de sport
- Nationalité : Américain
- Distributeur : Warner Bros. France
- Durée : 2h14mn
- VOD : Prime Video, Canal VOD, Orange
- Date télé : 5 mai 2024 22:55
- Chaîne : NRJ 12
- Box-office : 1 633 655 entrées France / 341 385 entrées Paris Périphérie
- Titre original : Creed
- Date de sortie : 13 janvier 2016
- Voir le dossier : La saga Rocky
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Résumé : Adonis Johnson porte en lui un héritage. Son père, celui qu’il n’a jamais connu, n’est autre qu’Apollo Creed, le champion du monde de poids lourd, mort sur le ring peu de temps avant sa naissance. Comme son père, Adonis aime la boxe. Il décide alors de retrouver le célèbre Rocky Balboa, ancien adversaire et ami d’Apollo Creed, pour savoir si le sang qui coule dans ses veines est bien celui d’un champion.
Critique : À l’heure où les franchises peinent à maintenir une certaine cohérence artistique, où les studios font les remakes des reboots et où les épisodes dérivés de saga sont légion, on était en droit de craindre le pire d’un film qui annonçait le passage de flambeau d’un personnage mythique du cinéma américain. L’éternelle histoire de l’ancien qui transmet son savoir à plus jeune que lui, sujet typiquement américain, laissait redouter plusieurs choses. D’abord, que Stallone ne soit qu’une caution pour faire vendre le film, un simple argument commercial, à l’instar d’un Bruce Willis qui cachetonne dans des "Direct-to-video" en faisant croire qu’il est la star du film. Ensuite, que Ryan Coogler, réalisateur de Fruitvale Station, déjà avec Michael B.Jordan, rejoue la partition de Rocky dans une redite fétichiste qui ne s’appuierait que sur l’héritage du passé pour oublier d’offrir un film qui raconte quelque chose de neuf, à l’instar d’un certain Star Wars 7.
- © Warner Bros
Heureusement pour nous, et pour Rocky, Creed n’est ni un film opportuniste, ni le film mausolée que l’on pouvait redouter. Plus une véritable suite qu’un spin-off, Creed : l’héritage de Rocky Balboa met en lumière le fils d’Appolo Creed, Adonis, qui marche sur les pas de son père et espère devenir, à son tour, un champion de boxe. Un personnage interprété avec justesse et beaucoup de conviction par Michael B.Jordan, que l’on avait découvert dans la géniale série Friday Night Lights, et qui s’était révélé au grand public dans le Chronicles de Josh Trank. Si la complicité avec le spectateur met un peu de temps à s’installer avec le nouveau héros, il faut sans doute mettre ça sur le compte de la nostalgie inhérente à ce genre de projet, qui empêche, dans un premier temps, de s’imaginer un autre acteur/personnage que Stallone/Rocky pour enfiler les gants et monter sur le ring. Pour autant, le film assume ce passage de relais jusqu’au bout, faisant de la transmission le cœur battant de Creed, l’héritage. Transmission d’un héritage familial d’abord, avec cette question que se pose le jeune Adonis : suis-je à la hauteur de mon père ?. Transmission d’un savoir et d’une sagesse, ensuite, à travers le personnage du mentor, joué ici par un Stallone en état de grâce. Et puis, la transmission la plus belle du film, c’est, sans doute, ce message d’un jeune à un ancien. Adonis grimpe vers les marches de la gloire quand Rocky les descend. A la fin, les deux grimpent, ensemble, vers cet objectif commun qui est celui du dépassement de soi. Et celui qui était soutenu dans son ascension, soutient, alors, celui qui chute. On n’est donc pas tant dans un film de boxe que dans un film sur deux personnages qui se battent, d’abord chacun de leur côté, puis, l’un pour l’autre.
- © Warner Bros
Cette analogie entre le combat sur le ring et celui de la vie a toujours été la colonne vertébrale de la franchise, et Ryan Coogler y fait honneur tant le scénario du film, qu’il a lui-même co-écrit avec Aaron Covington, joue sur cette thématique de la première à la dernière bobine. Et si la mise en scène de Coogler, sobre et solide, n’a rien de révolutionnaire, elle offre toutefois quelques scènes sur le ring très réussies, dont un impressionnant combat filmé en un unique plan séquence de plusieurs minutes. Parce qu’il prend son temps (2 heures 15 pour un film qui n’est pas un blockbuster, en 2015, c’est rare) et qu’il colle à ses personnages, le film emprunte ainsi beaucoup au très beau Rocky Balboa, précédent opus réalisé par Stallone en 2006, et qui offrait au personnage une seconde jeunesse, en mettant en scène, paradoxalement, les affres de la vieillesse et du temps qui passe. Ryan Coogler a l’intelligence de poursuivre le cheminement entamé par Sly sur son personnage, en allant jusqu’au bout d’une idée qui semble travailler l’acteur depuis quelque temps. Stallone a récemment déclaré qu’il ne tournerait pas Rambo 5, ne se sentant plus de taille à assurer physiquement. Un aveu qui se reflète à l’écran d’une bien belle manière. Transmettre, c’est donc offrir à d’autres ce que l’on n’est plus en état d’être. Parce qu’on ne peut plus porter ce combat qui a été le nôtre, et qu’il faut faire face à un nouvel adversaire, plus redoutable encore : le temps. C’est tout le message du film. Ici, Stallone rend les armes, et c’est magnifique. "L’important, c’est de se faire cogner et d’aller quand même de l’avant, c’est de pouvoir encaisser sans jamais, jamais flancher. C’est comme ça qu’on gagne". Cette phrase, c’est un Rocky tuméfié par la vie qui la prononçait en 2006. En 2016, quand il n’y croit plus, c’est le jeune Creed qui l’aide à retrouver cette conviction inébranlable que la vie est un combat qu’il ne faut surtout pas lâcher. On peut trouver ça naïf. On peut aussi trouver ça tout à fait bouleversant.
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