Le 20 août 2015
La thématique du bouc-émissaire explorée par le réalisateur de Avant l’aube, Raphaël Jacoulot. Un huis clos tragique à la tension palpable.
- Réalisateur : Raphaël Jacoulot
- Acteurs : Jean-Pierre Darroussin, Carole Franck, Grégory Gadebois, Isabelle Sadoyan, Karim Leklou
- Genre : Drame, Policier / Polar / Film noir / Thriller / Film de gangsters
- Nationalité : Français
- Durée : 1h42mn
- Date de sortie : 12 août 2015
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La thématique du bouc-émissaire explorée par le réalisateur de Avant l’aube, Raphaël Jacoulot. Un huis clos tragique à la tension palpable.
L’argument : Au cœur d’un été caniculaire, dans un petit village à la tranquillité apparente, le quotidien des habitants est perturbé par Josef Bousou. Fils de ferrailleurs, semeur de troubles, il est désigné par les villageois comme étant la source principale de tous leurs maux jusqu’au jour où il est retrouvé sans vie dans la cour de la maison familiale…
Notre avis : Un petit village français, avec son église, ses petites rues, ses champs, et la chaleur de l’été. Les habitants, tous unis, vivent en communauté, se connaissent tous, s’entraident. L’été est rude, le soleil plombant, la sécheresse bien là, et les récoltes s’annoncent mauvaises. La crise est palpable, elle qui frappe de plein fouet les campagnes. Ce « Coup de chaud », c’est celui des esprits qui s’échauffent face cette situation difficile. Les habitants sont pris à la gorge, s’épuisent. Les jeunes s’ennuient dans les rues du village, malgré le temps des premiers amours, de la liberté et de l’insouciance. Tout ce petit monde tente tant bien que mal de tenir la barre, ensemble. Mais il y a Josef. Adolescent simplet, Josef est différent, hors du groupe. Et dès la première scène du film, Josef meurt.
Ce qui intéresse Jacoulot, ce n’est pas la mort de Josef, mais ce qui a amené à son meurtre. Comment la communauté en vient-elle à se retourner contre un de ses membres ?
(C) Diaphana Distribution
Josef est limité, étrange, ses réactions sont imprévisibles, brusques, peut-être est-il dangereux. Il fouille, fouine, et partout, semble roder. Il inquiète. Si Josef n’a encore rien fait, il fera. Quelles sont les solutions ? C’est le cœur même du film : la réaction d’une société face à la peur, cette peur sous-jacente, amplifiée par les problèmes du quotidien, l’échec, le chômage, l’absence d’espoir de lendemains meilleurs. L’effet de groupe, sa perversité, est alors inévitable. Les soupçons se transforment en certitudes, et sans même le voir venir, c’est l’escalade du pire. Jeunes et moins jeunes, éduqués ou non, la communauté se retourne contre un individu, celui qui cristallise tous leurs démons. La différence sacrifiée au nom du mieux être de la majorité. Bien sûr, le récit prend alors une dimension politique, sociale, et ce n’est plus seulement de ce village dont Jacoulot parle sans jamais juger ses personnages, mais des sociétés dans leur ensemble, de la montée des extrêmes, que ce soit avant, ou maintenant.
La force du récit réside dans la place que Jacoulot donne au spectateur : nous aussi, Josef nous met mal à l’aise. Nous sommes dans cette communauté, à hauteur des personnages, du groupe, de la majorité. Pris dans l’engrenage. La violence arrive de façon insinueuse, presque imperceptible, et nous nous laissons bercer par ce qui nous semble juste. Si les personnages ne voient pas l’injustice arriver, le spectateur non plus. C’est lorsque ça dérape que nous comprenons que nous avons été pris au piège, malgré nous. Le film prend alors une autre dimension : ce qui a été construit jusqu’ici se déconstruit, et Josef qui était le bourreau devient la victime, l’incompris. Le bouc-émissaire du groupe - et donc du spectateur, condamné sans procès.
Avec une telle ambition, un récit mené avec intelligence, il est quelque peu dommage que la réalisation soit si classique. Le film s’affaire à dévoiler ses cartes méthodiquement, porté par des acteurs investis (dont Karim Leklou, formidable Josef, et Carole Franck, parfaite meneuse dépassée par sa colère), mais avec une mise en scène qui manque un peu de souffle. Il n’empêche que Raphaël Jacoulot arrive à ses fins, et confirme avec ce nouveau film son talent de cinéaste manipulateur.
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