Vous n’avez encore rien vu - la critique

Dixième film en compétition officielle, Vous n’avez encore rien vu marque le retour de Resnais à Cannes à l’âge de.. 90 ans, soit un demi-siècle après avoir présenté Hiroshima mon amour ! Avis à chaud...

L’argument : Après sa mort, Antoine, homme de théâtre, fait convoquer chez lui tous ses amis comédiens ayant joué dans différentes versions de sa pièce Eurydice. Il a enregistré, avant de mourir, une déclaration dans laquelle il leur demande de visionner une captation des répétitions de cette pièce : une jeune troupe lui a en effet demandé l’autorisation de la monter et il a besoin de leur avis...

Notre avis : Avec la fatigue accumulée lors de l’entame du 6ème jour de festival, le dernier Resnais est l’opportunité rêvée nous invitant à tomber dans les bras de Morphée, au grand dam d’Orphée (qu’on en perdrait notre latin), ce personnage de la mythologie grecque immortellement lié à Eurydice. Débutant sous les meilleurs auspices suite à la mort du metteur en scène de théâtre Antoine d’Anthac (interprété par Denis Podalydès, étant sociétaire de la Comédie-Française, ça coule de source !), lequel rameute dans son ultime demeure tous ses amis comédiens ayant à l’époque joué sur les planches la célèbre pièce de Jean Anouilh "Eurydice". S’ensuit le générique annonçant son décès durant lequel l’interlocuteur s’entretient avec chacun des acteurs en les appelant par leur véritable nom : "Allo, Pierre Arditi ?, "Allo, Michel Piccoli ?", et ainsi de suite. On vous épargnera de tous les citer, histoire de ne pas vous lasser car vous n’êtes pas au bout de vos peines ! Une des particularités de son œuvre consiste à se renouveler continûment par une idée de mise en scène révolutionnaire ; pour le dire autrement, à réinventer le langage cinématographique. Avec Vous n’avez encore rien vu, les quatre actes qui composent "Eurydice" prennent forme grâce à une jeune troupe théâtrale en train de répéter dans des entrepôts industriels à l’abandon. D’abord spectateurs (Mathieu Amalric, Lambert Wilson, Sabine Azéma - de plus en plus hystérique et insupportable au gré du film - et les autres), ils deviennent à leur tour acteurs interagissant avec leurs cadets. Pour notre plus grand malheur, Resnais nous refait le coup navrant (de théâtre filmé) déjà utilisé dans le brillant Mélo, avec tout le panel habituel qui s’ensuit (la mise en abyme, l’amour qu’il porte à ses acteurs fétiches, et j’en passe...). Espérons que vu son âge avancé (90 ans dans quelques jours !), le Jury ne cède pas à la facilité en consacrant l’immense réalisateur qu’il est (Hiroshima mon amour, Mon oncle d’Amérique ou Les herbes folles, qui, en raison de leurs qualités respectives, aurait chacun mérité la Palme d’Or), et cela au détriment d’un film mineur (pour rester respectueux à l’égard de ce très grand Monsieur du 7ème art)...