Le poids du passé
Le 1er mai 2014
Suzanne Bier et son scénariste attitré, Anders Thomas Jensen, transcendent ce drame familial psychologique pour lui donner des allures de tragédie grecque. Totalement maîtrisé d’un bout à l’autre.
- Réalisateur : Susanne Bier
- Acteurs : Connie Nielsen, Nicolaj Lie Kaas, Ulrich Thomsen
- Genre : Drame
- Nationalité : Danois
- Durée : 1h50mn
- Titre original : Brodre
- Date de sortie : 8 février 2006
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Suzanne Bier et son scénariste attitré, Anders Thomas Jensen, transcendent ce drame familial psychologique pour lui donner des allures de tragédie grecque. Totalement maîtrisé d’un bout à l’autre.
L’argument : Michael a une vie rêvée, une carrière militaire prometteuse, une superbe épouse et deux magnifiques filles.
Son jeune frère, Jannik est un petit voyou, un hors-la-loi.
Quand Michael doit partir en Afghanistan pour une mission de l’ONU, les relations entre les deux frères sont tendues.
Lors de son voyage, Michael est porté disparu, présumé mort. Sarah est épaulée par Jannik qui, contre toute attente, prend en charge la famille. Rapidement, Sarah et Jannik se rapprochent et deviennent très complices.
Notre avis : Résumer le cinéma danois actuel au seul nom de Lars von Trier serait réducteur et ignorant à l’égard de sa production florissante. Le "chouchou" de Gilles Jacob, découvert à Cannes avec Element of crime, a entrainé dans son sillage Thomas Vinterberg dont Festen aura marqué les esprits par une esthétique sans artifice et filmé caméra à l’épaule selon les préceptes du Dogme 95. Ce style très expérimental, Susanne Bier l’exploite subtilement dans Open hearts, lequel démarre de la même façon que Breaking the waves et qui lui apportera par la même occasion une renommée internationale amplement méritée. Brothers confirme haut la main qu’elle est la cinéaste danoise la plus douée et la plus intéressante du moment avec, dans un tout autre genre, Nicolas Winding Refn. Mieux que quiconque, Suzanne Bier sonde les tréfonds de l’âme humaine dans ce qu’elle a de plus complexe, animée par l’inconscient prêt à jaillir au moment le plus inopportun lorsque les manies comportementales reprennent le dessus sur la raison. Ainsi les deux frères (du titre du film) affrontent le quotidien de manière diamétralement opposée. D’un côté, l’aîné pour qui tout réussit (ou du moins en apparence) ; de l’autre, le cadet qui réintègre sa place dans la société vis-à-vis de laquelle il est en perpétuelle rébellion. Dès les retrouvailles familiales à l’occasion de sa sortie de prison, la joie partagée tourne court pour retomber dans le mécanisme des maladresses éducationnelles où la préférence paternelle saute aux yeux.
Grâce au scénario éblouissant de Anders Thomas Jensen (qui passera aussi à la réalisation avec entre autres l’allumé Adam’s apples), Suzanne Bier excelle à reproduire la vie dans sa réalité la plus crue où le moindre élément extérieur peut anéantir la prétendue solidité sur laquelle elle repose, à l’instar d’un château de cartes (dans Open hearts, le futur marié devient paraplégique à la suite d’un accident de la route). La première moitié assez similaire à Festen par ses non-dits prêts à exploser à tout moment fait place par la suite à un thriller éprouvant lors du retour miraculeux du grand frère, évoquant inévitablement l’univers de James Gray. Irrémédiablement, les traumatismes de guerre (suite à sa captivité par les talibans) et le rôle ambivalent que joue son jeune frère en prenant petit à petit sa place auprès des siens auront des conséquences dévastatrices... Les deux acteurs principaux sont déchirants tant ils apportent toute la crédibilité nécessaire à leur rôle (on les retrouve justement aux côtés de Mads Mikkelsen dans Adam’s apples), sans oublier la sublime Connie Nielsen. Le remake américain de Jim Sheridan paraît dès lors bien anodin en comparaison de son modèle danois, impressionnant de vérité au niveau du réalisme psychologique.
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