Le 7 septembre 2011
Tourné dans la semi-clandestinité par un cinéaste condamné à une peine de prison pour « propagande contre l’État », Au revoir est un cinéma de résistance et une œuvre majeure sur l’oppression
- Réalisateur : Mohammad Rasoulof
- Acteurs : Shahab Hosseini, Leyla Zareh, Hassan Pourshirazi
- Genre : Drame
- Nationalité : Iranien
- Distributeur : Pretty Pictures
- Durée : 1h40mn
- Titre original : Bé Omid é Didar
- Date de sortie : 7 septembre 2011
- Festival : Festival de Cannes 2011
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Résumé : Dans la situation désespérée de l’Iran d’aujourd’hui, une jeune femme avocate à qui on a retiré sa licence d’exercer, est enceinte de quelques mois. Elle vit seule car son mari journaliste vit dans la clandestinité. Traquée par les autorités, et se sentant étrangère dans son propre pays, elle décide de fuir...
Critique : Un choc esthétique de premier ordre ! En suivant au plus près Noura (Leyla Zarah, une révélation, aussi belle que grande comédienne), avocate interdite d’activité professionnelle à la suite des publications subversives de son mari, Mohammad Rasoulad signe une de ces sublimes peintures de femmes de l’histoire du cinéma, dans la mouvance de Muriel ou Le temps d’un retour d’Alain Resnais, En haut des marches de Paul Vecchiali ou encore La double vie de Véronique de Kieslowski ou Rosetta des Dardenne. C’est d’abord un portrait au scalpel d’une épouse et future mère blessée, dont les fêlures se révèlent progressivement, au rythme d’une mise en scène au scalpel qui prend le temps de cerner les hésitations, les instants faussement creux et les symptômes de l’aliénation politique : un entretien avec une employée d’agence de voyages chargée de délivrer clandestinement un billet d’avion, des visites médicales laissant présager le pire pour sa grossesse ou la visite inopinée de deux agents chargés de fouiller son appartement sont autant d’instants glacés révélant les tractations, hésitations, et épreuves d’une Iranienne traquée et prise au piège d’une bureaucratie sexiste et d’un pouvoir absurdement totalitaire.
- Copyright Pretty Pictures
C’est qu’Au revoir est aussi un grand film politique, pas une fiction sociale larmoyante et consensuelle mais un véritable objet de cinéma, proche des univers kafkaïens de Cadavres exquis de Francesco Rosi ou Hunger de Steve McQueen, Couloirs, salles d’attente, rames de métro et taxis sont ici des éléments de décor traduisant la solitude et l’enfermement d’individus privés de lien social, bien mis en lumière par des plans-séquences qui ne sont pas de simples figures de style.
- Copyright Pretty Pictures
« Quand on se sent étranger dans son propre pays, autant de sentir étranger dans un autre pays », réalise Noura, prise dans un dédale d’impasses où toute sonorité semble une menace permanente. Si Marjane Satrapi trouvait vite la fuite dans Persepolis, l’évasion est ici moins aisée et le pessimisme plus explicite. Tourné dans la semi-clandestinité par un cinéaste condamné (avec Jafar Panahi) à une peine de prison pour « propagande contre l’État », Au revoir est un cinéma de résistance et une œuvre majeure sur l’oppression, à voir en complément du magistral Une séparation de Asghar Farhadi.
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