L’herbe repousse
Le 27 avril 2014
Superbe livre d’images autour d’une figure complexe, cette ample fresque historique dépasse ses visées propagandistes et ne devrait pas intéresser que les historiens.
- Réalisateur : Febo Mari
- Acteurs : Febo Mari, Maria Roasio, Ileana Leonidoff, François-Paul Donadio, Nietta Mordeglia
- Genre : Historique, Film muet
- Nationalité : Italien
- Durée : 53mn (version restaurée)
- Titre original : Attila - Il flagello di Dio
- Plus d'informations : http://cinestore.cinetecadibologna....
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– Production : Società Anonima Ambrosio
– Version restaurée par la Cineteca di Bologna et le Filmarchiv Austria.
Superbe livre d’images autour d’une figure complexe, cette ample fresque historique dépasse ses visées propagandistes et ne devrait pas intéresser que les historiens.
L’argument : Les événements principaux de l’histoire d’Attila racontés en six chapitres : l’élimination de son frère Bleda qui lui permet de se mettre seul à la tête des Huns ; ses astuces diplomatiques pour s’assurer la non intervention des Wisigoths de Théodoric lorsqu’il attaque l’empire romain ; ses campagnes victorieuses et sa défaite près de Châlons ; ses amours avec la danseuse Ildico qui lui préfère l’ambassadeur de Rome Carpilion ; Sa retraite devant Rome et son mariage avec Honoria, soeur de l’empereur Valentinien, qui le tue durant la nuit de noces pour venger la mort de son amant Eugenio.
Notre avis : Poursuivant le filon historique et monumental illustré notamment, quelques années plus tôt, par le célèbre Cabiria de Giovanni Pastrone, cette opulente production de l’Ambrosio Film fut tournée durant l’automne 1917 dans les immenses studios de la compagnie situés Via Mantova à Turin, ainsi que dans la campagne piémontaise. Selon Hervé Dumont, dans son ouvrage de référence consacré à L’antiquité au cinéma, elle répondait aux appels du ministre Augusto Ciuffelli en faveur d’un cinéma à caractère patriotique et invitait les spectateurs à faire le rapprochement entre les hordes sanguinaires d’Attila envahissant la France et l’Italie du Nord avec les armées de la Triple Alliance qui venaient d’infliger de lourdes pertes aux troupes italiennes sur L’Izonzo et le Piave.
La vision* de la version certainement remontée et tronquée de ce film organisé originairement en 6 actes et d’une longueur de 2048 mètres (soit environ 1h30mn au lieu des 53mn actuelles) confirme partiellement ce jugement mais invite aussi à le relativiser.
- Attila - Febo Mari 1918
Febo Mari (1884 – 1939) , acteur, scénariste et réalisateur connu entre autres pour avoir convaincu la Duse de sortir de sa retraite pour interpréter le rôle de la mère dans son très beau Cenere, drame sarde naturaliste au style très dépouillé inspiré d’une oeuvre de Grazia Deledda, s’est octroyé le rôle titre et s’adonne avec retenue à un histrionisme dont il avait déjà fait étalage dans l’étonnant Il Fauno - le Faune (1917), s’amusant à composer un Attila sensuel et carnassier qui ne manque ni de panache ni de séduction.
Les manières raffinées et les tenues vestimentaires extravagantes font apparaître le légendaire roi des Huns comme un homme de pouvoir cruel et sans scrupules, mais aussi rompu au double jeu diplomatique, loin de l’image du sauvage primitif et sanguinaire brûlant tout sur son passage (celui dont on disait que l’herbe ne repoussait plus là où son cheval avait foulé le sol).
Autour de cette figure complexe (et à la mine assombrie dans la partie finale sous l’effet des mauvais augures), Mari, assisté de scénographes et costumiers inspirés, recrée un monde foisonnant et haut en couleurs où font finalement bon ménage un souci scrupuleux d’exactitude du détail, quelques anachronismes et la réécriture romanesque d’une histoire d’ailleurs mal documentée.
- Attila - Febo Mari 1918
Il fait défiler, en une suite de tableaux souvent saisissants, une foule de personnages et de péripéties, parfois à peine esquissées (l’élimination expéditive de l’évêque de Reims venu à la rencontre de l’envahisseur pour tenter de l’arrêter ; Sainte Geneviève incitant à la résistance sur les murs d’Orléans – sic !) mais réussit à donner un véritable relief à des figures telles que celle du nain Zercon, envoyé par Attila à la cour de l’empereur pour y intriguer, de la danseuse Ildico poursuivant de ses ardeurs le digne Caprilion ou de la guerrière Honoria qui semble tout droit sortie d’un poème épique de l’Arioste ou du Tasse : elle se déguise en soldat pour combattre aux côtés de l’homme qu’elle aime et qu’elle vengera en poignardant Attila lors de sa nuit de noce avec le roi des Huns.
Mari arrive également à donner une réelle ampleur aux scènes de foules (le pape discourant face à une immense assemblée) et de batailles (les soldats qui surgissent de la brume ou de la fumée dans de vastes paysages dénudés).
Bref : cet Attila, superbe livre d’images aux effluves vénéneux, vaut le coup d’oeil et ne devrait pas intéresser que les historiens. Il surclasse sans peine deux intéressantes productions de 1954, beaucoup plus datées en fin de compte : le très carton-pâte Sign of the pagan / le Signe du païen de Douglas Sirk, avec Jack Palance, et Attilla, il flagello di Dio de Piero Francisci, avec Anthony Quinn et Sofia Loren.
- Attila - Febo Mari 1918
*malheureusement en preview seulement pour le moment et en définition médiocre sur le site Cinestore de la Cineteca di Bologne : http://cinestore.cinetecadibologna.it/video/dettaglio/7174
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