Master of Sex !
Le 30 juillet 2021
Un premier film sur un sujet casse-gueule (le sexe) qui peine à s’émanciper du carcan "conservateur" français.
- Réalisateur : Delphine de Vigan
- Acteurs : François Morel, Riton Liebman, Éric Elmosnino, Didier Bezace, Valérie Bonneton, Laurence Arné, Julia Faure, Loïc Corbery
- Genre : Comédie
- Nationalité : Français
- Distributeur : Universal Pictures France
- Durée : 1h31mn
- Date télé : 20 mars 2024 22:35
- Chaîne : Téva
- Date de sortie : 15 janvier 2014
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Résumé : Élevée dans le culte de la performance et dans l’idée que toute compétence doit être optimisée, Emma est une jeune femme méthodique, volontaire et, en apparence, relativement sûre d’elle. Mais deux échecs consécutifs (réels ou supposés) lui laissent croire qu’elle a un vrai problème : elle est nulle au lit. Parce qu’elle est plus fragile qu’il n’y paraît, Emma décide donc de devenir… le meilleur coup de Paris ! Emma se lance alors dans la mise en œuvre d’un redoutable plan d’action (théorie, TP, validation des acquis…), lequel ne tarde pas à provoquer autour d’elle toute une série de malentendus et de catastrophes. D’une part, sa méthode ne s’avère pas très adaptée à son champ d’investigation et, d’autre part, Emma a sans aucun doute omis un détail : l’amour, lui, n’obéit à aucun plan. Dans cette quête absurde et loufoque, Emma apprendra à lâcher prise, à perdre le contrôle et, au bout du compte, devra conquérir sa liberté.
Critique : Après une première incursion dans l’écriture cinématographique avec Tu seras mon fils, Delphine de Vigan, auteure de formation (No et moi, Les Heures souterraines) s’essaie au dur métier de réalisatrice en signant A coup sûr, son premier film. Un passage derrière la caméra qui ne convainc guère tant cette énième comédie ayant pour toile de fond la difficile question du sexe refuse de se démarquer des standards du genre et fait montre d’un schématisme quasi systématique qui, s’il se justifie dans un premier temps, empêche le récit d’avancer...
On le sait depuis la nuit des temps : le sexe tient une place plus qu’essentielle dans la vie de tout un chacun, et des Français en particulier. Après les comédies du cocufiage (très en vogue dans les années 70 et toujours d’actualité), le cinéma a commencé à s’intéresser au sexe pour ce qu’il était, soit un moyen comme un autre de se connaître soi-même. On vous laisse le soin de vous remémorer les multiples comédies américaines et françaises de ces dix dernières années utilisant le triangle sexe / performance / amour où le fameux « acte » est au cœur de la problématique du héros. D’une manière générale, et sans doute en partie à cause de l’héritage des "teenage movies", c’est l’homme qui a un problème avec le sexe, l’acte constituant une sorte de besoin impérieux, de Graal, ou au contraire un procédé addictif et aliénant (voir le récent Don Jon de Joseph Gordon-Levitt). Dans ce monde où la performance sexuelle est souvent associée à une valeur virile et masculine, Delphine de Vigan surprend en faisant d’une femme (belle et désirable qui plus est) l’héroïne de sa gentillette histoire de fesses. Combien de fois a-t-on entendu que les hommes n’assuraient pas au pieu et que les femmes simulaient l’orgasme ? De fait, lorsque Emma se fait traiter post-coït de « limace sous anesthésie générale » par un prince pas très charmant, on est de prime abord assez intrigués, ravis de voir un si gros défaut entacher l’insupportable perfection de la belle. Mais la surprise ne dure hélas pas, la réalisatrice inscrivant le sexe dans une logique d’entraînement trop radicale pour être réellement crédible. Le film aurait sans doute gagner en profondeur s’il n’avait pas choisi de s’enfermer dans une structure narrative simpliste basée sur des quiproquos et des gags éculés plus ou moins bien amenés. On aurait aimé voir un changement radical chez le personnage, une vraie faille, de réelles hésitations ainsi qu’une perte de ses repères traditionnels. Mais sa capacité à tout gérer, en dépit de gaffes sans grandes conséquences, met paradoxalement en péril un film handicapé par son incapacité à surprendre le spectateur, tant il est balisé.
- "A coup sûr" : Laurence Arné et Eric Elmosnino
- © Universal Pictures International France
Autre problème majeur, en dépit de l’excellente Laurence Arné, dont l’aspect un brin glacé mélangé à une grâce naturelle empreinte de sophistication constitue le principal atout d’A coup sûr, on ne cesse de se demander pourquoi diable un film censé traiter de sexe et de la recherche d’une certaine féminité ne nous montre jamais vraiment ce qui se passe sous la couette. S’il manque au film de la chair, c’est avant tout au sens propre. On ne demandait pas du Lars von Trier mais tout de même... Delphine de Vigan ose tout juste un plan fugace sur l’opulente (et galvanisante) poitrine de son actrice, reléguant tout le reste dans l’espace du hors-champ. Côté personnages, on ne peut que louer la visible volonté de la réalisatrice de brosser une palette de seconds rôles qui se veulent attachants mais n’échappant pourtant jamais aux stéréotypes (le patron pervers, le stagiaire débilos, l’épouse modèle coincée, l’étudiante prostituée...). On notera tout de même le numéro de « chaudasse » d’une Valérie Bonneton en mémère excitée grâce à une substance aphrodisiaque, l’un des trop rares moments réellement drôles du métrage. Et puis il y a Elmosnino, devenu l’un des principaux chantres du comique à la française, qui semble prendre un malin plaisir à gâcher son talent dans des rôles insipides et autres histoires d’amour tarte à la crème. Le film fait d’ailleurs très fort sur ce point, parvenant même à placer une romance (scénaristiquement surréaliste) à Cabourg (bord de mer oblige) toute droit sortie du Cœur des hommes. L’histoire d’amour possiblement impossible entre Tristan, le journaleux gauchiste de circonstance, et une Emma qui s’amourache tout de même un peu vite du beau brun ténébreux, atteint des sommets de platitude, jusqu’à une ultime mièvrerie qui nous indique maladroitement que le film est bel et bien terminé. Pas de surprise, c’est un happy end et Emma a trouvé l’Amour avec un grand A. Moralité : le sexe, qu’on soit bon ou mauvais, ne fait pas le bonheur mais y contribue fortement s’il est utilisé à bon escient. Comme dirait l’autre, l’important c’est de savoir lâcher prise et de s’éclater dans une société formatée par le culte de la réussite. Une conclusion un poil trop « light », à l’image d’un film poussif qui donne la désagréable impression de meubler pour masquer le manque d’originalité d’un scénario pourtant prometteur. Au final, A coup sûr manque de peps et d’ironie et apparaît comme bien trop sage pour prétendre à une quelconque innovation. Encore un bel exemple de comédie 100 % made in France qui persiste à vouloir nous brosser dans le sens du poil au risque de prendre l’eau avant même d’avoir atteint la mer. Heureusement qu’il y a des Dupontel pour tenter de sauver les meubles, ou les navires...
- "A coup sûr" : affiche officielle
- © Universal Pictures International France
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